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Sous la surface
23 janvier 2018

Les laissé-pour-compte de la mondialisation

Même avant le désastre, Scranton n’avait pas connu un siècle très favorable. En 1902, la Lackawanna Steel Company avait quitté le nord-est de la Pennsylvanie à la recherche d’un accès aux moyens de transport plus facile et d’une main-d’œuvre plus docile. La zone possédait toujours du charbon et assez d’énergie pour lancer de nouvelles activités : dans les années 1920, un fabricant local de boutons devint le numéro un de la gravure de disques 78 tours. Mais après la Seconde guerre mondiale, la demande de charbon déclina. Ensuite, en 1959, des mineurs qui travaillaient à la frange d’une veine de charbon percèrent le lit de la rivière Susquehanna, qui inonda les galeries comme l’eau d’une baignoire qui se vide. Les mines ne s’en sont jamais remises. “Beaucoup de territoires autrefois prospères du monde industrialisé n’ont pas trouvé comment perdurer dans une économie numérique et mondialisée. Mais ils n’ont pas disparu” La vallée que traverse la rivière Susquehanna est bordée d’usines fermées. Les dégâts sont bien visibles. La ville de Scranton a frôlé la faillite en 2012. Pourtant, en dépit de presque un siècle d’épreuves économiques, plus d’un demi-million de personnes restent dans cette région. L’histoire se répète dans beaucoup d’autres territoires autrefois prospères du monde industrialisé. Ils n’ont pas trouvé comment perdurer dans une économie numérique et mondialisée. Mais ils n’ont pas disparu. Les politiques ont tenté d’intervenir. Les États et les collectivités locales ont dépensé des centaines de millions de dollars au cours des décennies passées en infrastructures et projets de reconversion dans la région de Scranton, comme ils l’ont fait pour le Teesside en Grande-Bretagne et le Pas-de-Calais en France. Selon une estimation, la Pennsylvanie a dépensé plus de 6 milliards de dollars entre 2007 et 2016 en subventions aux entreprises, plus que tout autre État américain. La plus grande partie a été octroyée au nord-est de l’État, sa partie la plus sinistré. Mais déverser des fonds ne suffit pas. Pour améliorer le destin des territoires laissés pour compte, les décideurs politiques doivent se montrer plus déterminés et mieux s’accorder sur ce qui marche. Ils doivent faire mieux. Les forces à l’œuvre dans les inégalités territoriales sont insérées dans les mécanismes de mondialisation, ce qui rend difficile d’y résister. Il est vrai que la mondialisation pourrait connaître des ratés ou même revenir en arrière. Une des raisons pour laquelle les électeurs du nord-est de la Pennsylvanie ont voté à une grande majorité pour Donald Trump en 2016, en lui offrant l’État. C’est dans ce même espoir que la Grande-Bretagne, comme le Teesside, a voté pour le Brexit et que le Nord de la France, économiquement éprouvé, a offert de beaux scores au Front national de Marine Le Pen. Mais même si la mondialisation se figeait, les régions qu’elle a affaiblies ne vont pas se rétablir comme par magie.

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Commentaires
Sous la surface
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Non, ce n'est pas un blog consacré à la nage synchronisée ou aux activités aquatiques : il est plutôt question ici de regarder sous la surface de l'actualité, où l'on trouve souvent une faune aussi étrange que celle des grands fonds marins...

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